Terres ancestrales : comment ce joueur de cricket de New York honore son héritage caribéen

Athlètes*

Quand Derick Narine a quitté le Guyana pour s'installer à New York, il a emporté dans ses bagages sa passion pour le cricket et sa communauté.

Dernière mise à jour : 30 avril 2021
Pris sur le vif : famille, cricket et communauté avec Derick Narine

« Pris sur le vif » est une série vous présentant des athlètes provenant des quatre coins du monde.

« Pris sur le vif » est une série vous présentant des athlètes provenant des quatre coins du monde.

Dès qu'il a été en âge de tenir une batte, Derick Narine s'est pris de passion pour le cricket. À l'adolescence, il représentait déjà son pays, le Guyana, en compétition. Puis, après avoir déménagé à New York alors qu'il entrait au lycée, il a mené son équipe à son premier championnat de cricket. Mais le rapport que Derick entretient avec ce sport va bien au-delà des titres. Le cricket fait partie de sa famille et, à chaque fois qu'il entre sur le terrain, il se sent lié à la longue lignée d'ancêtres qui ont pratiqué ce même sport au fil des générations.

Au terrain de cricket de Baisley Pond Park situé à Jamaica, un quartier du Queens, Derick nous raconte les différences culturelles qui existent entre le cricket à New York et au Guyana, mais aussi comment, malgré tout, le jeu parvient toujours à rassembler les gens.

Comment as-tu découvert le cricket ?

Eh bien, mes ancêtres ont été amenés [au Guyana] depuis l'Inde, en tant qu'esclaves, pour travailler dans l'industrie sucrière. L'Inde (et l'Angleterre) est le lieu de naissance du cricket. Donc, si tu viens de là, tu dois savoir jouer ou du moins avoir quelques notions sur le sujet. Lorsque [mes ancêtres] sont arrivés au Guyana, ces connaissances se sont transmises de génération en génération. Dès que tu es en âge de tenir une batte, on t'emmène au parc pour t'apprendre à jouer. Tu commences par jouer pour ton village, puis tu es sélectionné pour tout le district. De mon côté, j'ai été sélectionné pour le pays. J'ai joué pour le Guyana à l'âge de 16 ans.

Pris sur le vif : famille, cricket et communauté avec Derick Narine
Pris sur le vif : famille, cricket et communauté avec Derick Narine

Tu as déménagé à New York pour aller au lycée. C'était comment ?

J'étais surexcité. J'avais vu tant de choses à la télé, dans les films, etc. Quand je suis arrivé ici, c'était totalement différent, surtout en vivant dans le Queens. Je pensais qu'on aurait une maison, un beau jardin et tout ça, mais tout était tellement concentré. La réalité n'était pas comme je l'avais imaginée.

Pensais-tu pouvoir jouer au cricket à New York ?

Je ne m'attendais pas à jouer au cricket, car je n'avais jamais entendu parler du cricket [pratiqué aux États-Unis]. Mais quand je suis arrivé au lycée John Adams, un de mes camarades, qui vivait juste à côté de chez moi au Guyana, m'a dit qu'il y avait une équipe de cricket. Je suis allé faire un essai pendant une séance, et l'entraîneur [m'a nommé] capitaine. Nous avons joué et remporté le championnat. [C'était la] toute première fois que John Adams remportait le championnat.

Pris sur le vif : famille, cricket et communauté avec Derick Narine

Comment est l'ambiance dans le Queens ? Les joueurs se parlent mal ?

Tout dépend de contre qui tu joues. Quand tu joues contre des Indiens, ils ne disent pas grand-chose parce que même s'ils disent des trucs… je n'y comprends rien. Mes ancêtres sont arrivés d'Inde, mais je ne parle pas leur langue. Quand tu joues contre des Jamaïcains, ils te lancent des insultes. Ils te disent toutes sortes de choses, mais ils doivent le dire de manière à ce que l'arbitre du match ne puisse pas les entendre car ils peuvent être pénalisés pour ça. On n'y fait pas trop attention car ça nous arrive de faire pareil en retour, mais il arrive que ça nous touche, parce que quand tu es à un poste de défenseur, tu cherches simplement à bloquer la balle pour que ton coéquipier puisse frapper.

Comment sont les terrains à New York ?

On joue un peu partout. Les terrains de Kissena [à Flushing, dans le Queens] sont les pires. Il y a plein de trous juste derrière l'endroit où on frappe la balle. Et il y a un grand bassin, donc si le gardien de guichet rate la balle, elle atterrit directement dans l'eau. Il faut alors prendre un bâton et essayer de la faire sortir. À ce moment-là, la balle est trempée et elle gonfle.

« Malgré tout ce qui se passe, [les gens] jouent encore au cricket. »

À quoi ressemble la communauté du cricket ?

Après le match, l'équipe [adverse] vient vers nous et nous félicite. Ils te disent que tu es un bon joueur et te demandent le nom de ton profil sur Facebook et Instagram pour discuter et demander quelques conseils sur tel ou tel point. Quand on dispute de grands matchs, tout le monde vient montrer son soutien. Le cricket rassemble beaucoup de monde. Malgré tout ce qui se passe, [les gens] jouent encore au cricket.

Rédaction : Sam Hockley-Smith

Reportage : septembre 2020

Date de première publication : 26 avril 2021

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